Week-end
Vendredi 14 Aout 2009 vers 01h00
Si
la première partie de nuit d’hier était horrible, celle que j’ai vécu
ce soir était atroce. Une fois de plus employé sur la trieuse
automatique, je suis tombé sur une équipe composée de Michel, Daniel et
moi. En réalité nous étions quatre mais le dernier ayant une propension
à ne rien faire, j’ai cru qu’il avait joué l’homme invisible durant
quatre heures. Lorsque l’on injecte le courrier dans les entrailles de
la bête, derrière, un autre est chargé de vider les bacs pleins. Toutes
les demi-heures nous tournons sur nos positions pour prendre la place
du précédent. Casquette (l’homme invisible), était chargé de vider les
bacs alors que je chargeais la machine. Lorsque vint mon tour de
prendre sa place, le chantier sur lequel se posèrent mes yeux les
firent sortir de leurs orbites. Un désordre indescriptible régnait sur
le chantier. Les bacs dégueulaient de courrier. Sept ou huit lumières
indiquaient que certains demandaient à être remplacés. Du courrier en
vrac reposait dans de grandes caisses et attendait d’être trié
manuellement. Alors que j’aurai dû tranquillement passer en revue
l’intégralité des bacs placés au cœur de la trieuse sans me soucier de
vider de temps en temps les plus lourds, il a fallut que je cours pour
ne pas mettre en péril le bon fonctionnement de la machine. J’ai cru au
départ que Casquette avait eu une absence. Qu’il allait se remettre en
piste et que j’allais enfin pouvoir souffler. Mais non, il continua son
manège durant quatre heures. Et à chaque fois que je devais prendre sa
place, ce fut la même chose. Je devais assumer personnellement la tache
qu’il n’avait pas assurée au moment venu.
Muet,
il est évidemment inutile de lui faire la moindre remarque puisque
lisant sur les lèvres, il lui suffit de détourner le regard lorsqu’une
conversation ne lui convient pas. Ce qui manque sérieusement à ce
personnage, ce n’est pas la parole mais une conscience. Sorte de Hells
faussement dur, il arrive le soir derrière le guidon d’un très beau
modèle de Harley Davidson. Son moteur réveille le soir les pigeons qui
dorment nichés sur le toit des immeubles, et le matin, les voisins
encore engourdis de sommeil.
Dans un peu plus d’une demi-heure, je vais travailler à l’ouverture des sacs postaux. Je prie pour qu’il n’y soit pas. Déjà que la température y frise les trente-cinq degrés et qu’y baigne une odeur puissante de transpiration, je n’ai pas envie en plus de doubler ma charge de travail.
J’ai à coté de moi une bouteille d’eau fraîche qui je l’espère m’aidera à diluer le verre de lait demi-écrémé que j’ai osé boire en arrivant.
Encore quelques heures à supporter l’infernale moiteur du travail et je retrouverai Anna à Nîmes. Vers 10h30 je pourrai enfin la serrer dans mes bras, déposer un baiser sur ses lèvres et partir avec elle loin de la foule…
C'est le week-end. Je pars retrouver ma bien aimée...